Directive nitrates Le millefeuille réglementaire se met en place
La révision du dispositif de lutte contre les nitrates touche à sa fin, légèrement amendé par la profession.
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La réforme est sur le point d'être bouclée. Elle a pris du retard. Le temps d'amener l'administration à prendre en compte quelques-unes des réalités techniques et économiques qui semblaient lui échapper. Une mobilisation massive du monde agricole a été nécessaire. Il a fait entendre ses arguments à travers les groupes de concertation et les consultations publiques, mais aussi en interpellant les parlementaires et en manifestant dans la rue. Possible que le calendrier, avec la proximité des élections aux chambres, ait motivé les syndicats à s'impliquer... Mais à juste titre. Car la réforme du dispositif de lutte contre les nitrates est lourde de conséquences. Seuls sont visés les exploitants des zones classées « vulnérables ». Mais ces dernières sont étendues, pardon, révisées tous les quatre ans. Début 2013, ce sont 823 communes supplémentaires qui sont passées sous le statut « vulnérable ». Nettement moins que dans les premières propositions des administrations de bassins. Mais encore trop pour la profession, pas toujours convaincue par les critères de classement.
En juin, la sentence de la Cour de justice européenne tombait. La France était condamnée pour ne pas avoir désigné assez de zones vulnérables. Toutefois, le jugement concernait les zonages en vigueur au moment de sa traduction en justice, c'est-à-dire avant qu'ils soient révisés. Paris peut donc encore espérer que sa nouvelle cartographie convaincra...
EXCÈS DE ZÈLE
Un autre contentieux entre la France et la Commission européenne concerne les programmes d'action. Là aussi, la France est priée de donner quelques tours de vis supplémentaires. A elle de choisir où... Un rapide tour d'horizon montre qu'elle a placé certains curseurs plus haut, d'autres plus bas que ses voisins. La Commission ne lui réserve d'ailleurs pas ses remontrances. Grèce, Pologne, Luxembourg, Allemagne... chacun se fait taper sur les doigts au premier soupçon de laxisme. Ce qui favorise les excès de zèle.
Les autorités françaises ont fini par concéder quelques aménagements au programme d'actions national. Les durées minimales de stockage d'effluents ont été réduites par rapport à la première mouture. Mais beaucoup d'éleveurs qui se trouvent dans une zone nouvellement classée, ou qui deviennent « hors normes » à cause du durcissement de la réglementation, devront réinvestir dans leurs capacités de stockage.
Pour certains éleveurs bovins (selon la région et le système d'élevage), il faudra stocker jusqu'à 6,5 mois, et jusqu'à 7,5 mois pour les éleveurs de porcs les moins bien lotis. Le tout avec de nouvelles normes d'excrétion d'azote, qui pénalisent l'élevage laitier herbager. Jusqu'au 1er septembre 2014, une dérogation fixe à 95 kg par vache et par an la quantité d'azote excrétée. Ensuite, les « vraies » valeurs (jusqu'à 126 kg) seront applicables. Bruxelles leur permettra peut-être de déroger au plafond d'épandage de 170 kg/ha.
Mais ce vrai faux cadeau n'allégera pas tellement la facture de la mise aux normes et entraînera à nouveau de la paperasse. Le secteur avicole, lui aussi, paiera cher la réforme : le fumier de volailles de moins de 60 jours ne pourra plus être stocké au champ, même sous une bâche.
DISPARITÉS RÉGIONALES
Autre sujet sur lequel la profession n'a pas obtenu d'assouplissements : le calendrier d'épandage. Fixé au niveau national, il concentre les possibilités d'épandage sur des fenêtres restreintes, sans tenir compte des disparités régionales. Les préfets pourront l'adapter..., mais seulement pour aller vers davantage de restrictions. En revanche, le seuil de pente à partir duquel l'épandage est proscrit a été relevé pour certains fertilisants, à condition d'avoir une haie ou une bande tampon en bas de pente. Mais aucun épandage n'est autorisé au-delà de 20 %. L'obligation de couverture automnale des sols a elle aussi été légèrement assouplie, notamment en élargissant les possibilités de recours à une destruction chimique. La possibilité d'adaptations régionales est laissée à la discrétion du préfet, dont la marge de manoeuvre est toutefois restreinte.
D'autre part, outre les analyses de sol et obligations d'enregistrements des pratiques, une fabuleuse usine à gaz a été mise en place pour s'assurer que les paysans ne gaspillent pas l'engrais à tour de bras. Désormais, le prévisionnel de fertilisation s'appuie sur un calcul alambiqué, basé sur des références mises au point par des groupes d'experts régionaux. Ou comment empêcher l'agriculteur de faire son calcul lui-même...
Le volet national étant bouclé tant bien que mal, les discussions se poursuivent en région pour tenter d'achever les programmes régionaux dans les délais, soit avant fin 2013. Globalement, il s'agit de superposer au programme national de nouvelles exigences, soit pour l'ensemble de la région, soit uniquement dans des « zones d'actions renforcées ». Pour prévenir tout laxisme de la part des préfets, un arrêté national (23 octobre) impose d'emblée un allongement des périodes d'interdiction d'épandage pour certaines régions. Rien n'interdit aux autres de prendre ces mesures de leur propre chef.
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